Les dernières séances ont été consacrées au dessin le plus ambitieux que j’ai eu à réaliser jusqu’à maintenant : une case montrant cinq personnages vus en plongée, donc en perspective. Sans surprise, j’en ai chié !
Cinq personnages en perspective : croquis de recherche
La plongée sur un personnage en portrait, j’avais déjà fait. Voir notamment la case 2 de la planche 4 de la BD d’entraînement qui m’occupe actuellement. Mais jamais de scène de groupe sous cet angle un peu technique.
D’ailleurs, dans le « storyboard », j’avais spontanément choisi un angle plat, par confort :
Mais pour l’exécution de ce schéma sur la planche, j’ai décidé de corser un peu l’affaire. C’est comme ça qu’on apprend des choses.
Quelques croquis de recherche pour cette case aux cinq personnages vus en plongée :
On voit que la technique de base pour dessiner des personnages en perspective est de les placer dans des « boites ». Ces paraléllépipèdes faits de droites se gèrent en effet beaucoup plus facilement. Leurs arêtes s’enfuient vers le ou les points de fuite et donnent ainsi de bons repères pour faire également s’enfuir les volumes du corps humain. En tout cas, c’est la théorie. Comme on peut le constater sur les dessins ci-dessus, la pratique ne produit pas toujours les résultats escomptés…
Les cinq personnages en perspective sur la planche de BD
Au final, j’ai dû passer 2 ou 3 heures à chercher le bon angle pour les personnages sur des feuilles de brouillon. Où placer le point de fuite (le nadir) ? Quelles dimensions donner aux « boites » pour que les personnages ne soient ni trop grands, ni trop petits, ni trop larges, ni trop étroits ? La case étant petite, comment poser des repères de « boites » suffisamment précis pour ne pas produire des personnages difformes ?
Je n’ai pas vraiment trouvé de réponses pragmatiques à ces questions. C’est pourquoi j’ai décidé d’y aller à l’instinct.
Personnage 1
Sur la planche, en 3 minutes top chrono, sans trop hésiter, j’ai dessiné ça :
En trois minutes, en dessinant au visuel sans me préoccuper de la boite, des repères et de la théorie, j’ai produit une base bien meilleure qu’en deux heures de recherches laborieuses. C’est un bon enseignement. Le dessin doit rester en partie intuitif. La théorie et l’étude servent à enrichir la bibliothèque des possibilités contenue dans le cerveau. Mais la réalisation de ces possibilités demande du rythme, de la fluidité, de l’intuition. Et cette dernière vient avec la pratique.
Il faut donc savoir parfois se débarrasser de la théorie et dessiner ce qui nous semble juste.
Personnages 2, 3, 4 et 5
Ce second personnage met en évidence le syndrome de la tête trop grosse qui frappe systématiquement quand je n’y prends pas garde.
Le troisième personnage a d’autres problèmes :
D’abord, il est trop petit. Si on suit les lignes de fuite définies par les pieds des deux premiers personnages, qui se font face, on obtient un point de fuite sur la ligne d’horizon (hors champ ici). Vers ce même point, on doit pouvoir aussi faire fuire l’axe défini par les têtes des personnages 2 et 3, car cet axe, si’ lon transposait cette case dans la réalité, serait parallèle à celui des pieds du premier personnage (de dos). Or ce n’est pas le cas ici : la tête du personnage 3 se trouve au-dessous de l’axe sur lequel elle devrait être alignée.
Deuxième problème : le troisième personnage est bien trop statique. Son pote vient de se faire agripper au col par le personnage de dos. Il ne peut donc pas rester sans réaction, et son corps doit l’indiquer.
Après correction donc :
C’est mieux. Sa posture contient un peu de dynamisme et la hauteur de sa tête indique qu’il mesure à peu près la même taille que les autres.
Les deux derniers personnages :
Ajout des détails (visages, mains, vêtements)
L’ajout des vêtements sur ces repères anatomiques n’a pas posé trop de problème. Il reste néanmoins difficile de faire dans le détail quand on dessine petit, et c’est le problème récurrent sur cette BD d’entraînement. La faute, en plus du manque d’expérience, à un découpage trop serré, avec parfois plus de dix cases par planche (celle-ci en comporte onze) quand il en faudrait au maximum six.
Ce problème a surtout des conséquences sur les visages. Mais il n’a pas rendu non plus le dessin des mains très facile…
Une case complexe donc, qui montre bien les limites de mon savoir-faire à ce stade de l’apprentissage.
Au total, j’ai dû y passer entre 10 et 15 heures, et ce uniquement pour le crayonné. Sans faire un seul élément de décor, qui plus est. Il faudra ajouter la texture du sol, au moins. Et ne pas oublier les ombres portées.